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Soutenir ceux qui vivent la violence

Soutenir ceux qui vivent la violence

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La pandémie a créé toutes sortes de stress pour tout le monde. Le stress peut souvent engendrer la violence et nous devons donc être prêts, surtout maintenant, à soutenir ceux qui la vivent.

Notre rédactrice invitée, Suzanne Marcotte, est travailleuse sociale et thérapeute en abus et traumatismes au Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario à Ottawa (Ontario). Elle parle du "cycle de la violence" et de ce que les praticiens du soutien familial peuvent faire pour aider.


En écrivant ce blog, je réfléchis au nombre d'enfants avec lesquels j'ai travaillé au fil des ans et qui ont été exposés à la violence domestique. Je pense à une jeune adolescente qui, chaque soir, plaçait les chaussures de son frère ou de sa sœur près de la porte, prête à sortir rapidement ; je pense à ce jeune garçon qui ne se sentait en sécurité qu'en dormant dans son placard, ou je pense à une autre adolescente qui, des années après avoir quitté son père, est toujours hantée par les souvenirs de ses mauvais traitements envers sa mère. La première pensée qui me vient à l'esprit est que je n'aime pas les termes "exposé à" ou "témoin de" la violence domestique. Les enfants vivent la violence. Tous les aspects de leur développement en sont affectés.

"Un garçon qui voit sa mère être maltraitée a dix fois plus de chances de maltraiter sa partenaire féminine à l'âge adulte. Une fille qui grandit dans un foyer où son père maltraite sa mère a plus de six fois plus de chances d'être abusée sexuellement qu'une fille qui grandit dans un foyer non violent". (1)

De plus en plus, nous comprenons ce qui provoque "le cycle de la violence". Grâce à la recherche, nous apprenons l'impact des hormones de stress produites dans notre corps lorsque nous sommes dans des situations de peur. Ces hormones modifient de différentes façons le développement du cerveau d'un enfant. Elles ont un impact sur de nombreuses parties du cerveau, notamment celles liées au langage, à la capacité de réguler les affects et au fonctionnement exécutif (2).

La violence domestique peut également transformer la relation d'attachement. Les mères peuvent prendre soin de leurs enfants, s'en occuper et bien réagir, mais lorsqu'elles sont agressées et effrayées, elles ne peuvent pas répondre à la détresse de leur enfant. Cela crée une désorganisation dans l'attachement, ce qui affecte encore une fois la capacité à réguler l'affect. La maison devrait être notre refuge, mais pour les enfants qui grandissent dans un foyer où règne la violence, la sécurité devient souvent un concept étranger. Cette perte du sentiment de sécurité peut même conduire à un syndrome de stress post-traumatique.

Que pouvons-nous faire ?

  • Soutenez la mère ! Mettez-la en contact avec des services qui peuvent l'aider même si elle n'est pas prête à partir (3).
  • Ne jugez pas. Les victimes de violence domestique, comme les victimes d'abus sur les enfants, portent une honte incroyable et il est important qu'elles soient accueillies avec attention et empathie.
  • Aider les enfants à développer leur résilience. Cela peut se faire de plusieurs façons : en les aidant à développer des stratégies d'adaptation et des outils pour réguler leur affect ; en augmentant leur estime de soi ; en leur apprenant à se fixer des objectifs et à les atteindre ; en partageant l'humour ; en construisant des souvenirs positifs (boîte de souvenirs positifs) ; en leur apprenant la visualisation ; en développant des compétences ; et en les aidant à se connecter avec les autres.

Il est également important de prendre soin de soi-même. Savoir qu'une famille est aux prises avec des problèmes liés à la violence nous donne souvent un sentiment d'impuissance. Prendre soin de soi-même devient important.

Suzanne Marcotte

Travailleur social et thérapeute en matière de maltraitance et de traumatismes

Hôpital pour enfants de l'est de l'Ontario

  1. Vargas, L. Cataldo, J., Dickson, S. (2005). La violence domestique et les enfants. Dans G.R. Walz & R.K. Yep (Eds.), VISTAS : Compelling Perspectives on Counseling. Alexandria, VA : American Counseling Association ; 67-69.
  2. Pour plus d'informations sur l'impact de la violence sur le cerveau en développement, on peut lire les travaux de Bruce Perry et Bessel Van Der Kokl entre autres.
  3. Le Réseau ontarien des centres de traitement des agressions sexuelles et de la violence domestique (Ontario Network for Sexual Assault/Domestic Violence Treatment Centers) propose sur son site web une liste de centres répartis dans tout l'Ontario. Il peut être une bonne ressource pour obtenir plus d'informations, notamment sur les services locaux. "L'action ontarienne contre la violence faite aux femmes " aurait également sur son site des informations très pertinentes pour les services francophones.